mardi 8 mars 2011

Celui qui marche

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Sur le sable il est en mots posés, en mots sablés, en incertitude et solitude, en mots rangés dans l'interstice de la serrure, en clef de sol et clef d'espoir dans la gorge de l'inespéré… Une griffure sur la gerçure d’une peau de sable, de sel et d'eau.

Il invente une image, une trace du temps dans la chair du sable, une odeur, un serment, un désir incertain dans le corps de la plage, une image lointaine qui lui glisse des mains, une fleur de caillou dans le cœur de la pierre, et les reflets du vent qui caressent son ombre au carrefour du monde, il invente, il s’affaire… il réinvente une image.

Le temps est un festin… Sur le sable la table est mise : une poignée d’eau et de sel, et des parfums d’embruns sur la crête des dunes… Le vent court sur les flots qu’il trousse de sa main, invisible et fragile… Le doute s’installe dans le creux de la vague, le doute vient mourir sur le lit de la plage.

Face à la mer, il sent le poids du monde, les pieds comme des cailloux, les chevilles enserrées d’eau et de sel… et de sable d’amer, comme des bracelets de pierres et d’or fin. Face à la mer, il défait les embruns et plonge dans la vague qui se roule et s’enroule dans les draps de la plage, il s’étend, il s’allonge… son cœur s’ouvre au ciel comme un rouge coquillage.

Sa blessure est béante dans sa poitrine de sable… Il est seul, il est un, indivisible dans le petit matin, en solitude dans les bras du jour… Il s’étire, il s’allonge, il se lève et retrouve les siens, ceux qui le saisirent, le suivirent, le fuirent … et virent les blessures ouvertes dans les paumes de ses mains.



(Peinture : Spectre du Soir sur la Plage [détail] / Salvador Dali)

8 commentaires:

sido a dit…

A leur tour les ombres s'allongent, s'accrochent à ses pas, s'agrippent à sa mémoire, spectres bleus en marche, compagnons de sa solitude tandis que le sable indiscret en étale les griffures jusque vers la mer endormie.

Anonyme a dit…

"Qui nommes-tu mauvais?
- Celui qui veut toujours faire honte.
Qu’y a-t-il pour toi de plus humain?
- Epargner la honte à quelqu’un.
Quel est le sceau de la liberté acquise?
- Ne plus avoir honte de soi-même."

F. NIETZSCHE

maria-d a dit…

" Et c’est pourquoi l’homme noble
s’impose de ne pas humilier les autres hommes:
il s’impose la pudeur devant tous ceux qui souffrent. "

du même Nietzsche

camille a dit…

Cet homme qui marche les mains blessées
Cet homme qui marche chevilles liées
Cet homme-dieu au coeur si grand
Cet homme si beau, nous donne envie de le suivre
avec vous chère Maria-D

michel, à franquevaux. a dit…

Mémoire du silence:

Dans sa main,
invisible et fragile,
une poignée d’eau et de sel,
et des parfums.
De mémoire de rose,
on n’a jamais vu mourir
un jardinier.

Kaïkan a dit…

Le jardinier, comme cette apparition au sortir du golgotha ... Les blessures aux mains, aux pieds et au flanc ... chaque homme porte invisible ces stigmates ...

jeandler a dit…

Les blessures les moins visibles sont celles de l'âme.

maria-d a dit…

@ Sido ... accrochons-nous à ses pas.


@ Anonyme... merci d'être.


@ Camille ... alors, suivons-le... n'hésitons pas.


@ Michel ... le jardinier tend la main et donne vie à la rose.


@ Kaïkan... "il leur montra ses mains et ses pieds"


@ Jeandler... mais souvent elles suintent (visibles) sur les mains, les pieds et le flanc.


merci tout grand à vous tous