vendredi 7 mai 2010

Caballo

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Le matin est pour lui une nuée de fétus dans la lumière du monde. Un lever de soleil sur le front plissé de la terre et les rides houleuses de la mer.


Ses naseaux soufflent, fument, frémissent et dessinent comme dans un rêve des volutes de brume sur la page nacrée du grand livre sacré qui s’ouvre sur la plage.
Son œil est vif, intelligent, il scrute et écoute sans œillères, sans rênes et sans mors la valse ludique du vent qui caracole dans les branches, entre les hautes herbes et sur la pelure de l’étang … il caracole et danse, et l’invite à le suivre sur les chemins de sable et de terre à l’odeur aigre de tamarin… .
Son oreille se dresse, palpite, elle guette la voix des herbes qui chantent dans l’aube rose et l’habillent de fleurs des champs au goût de luzerne et de trèfle… et de cette forte odeur sauvage, mais qu’il connait si bien… ce vent de liberté.


Le jour lui appartient, en cette chevauchée dans le chant ancestral venu d’un monde premier par le sentier des origines. - Lui... l’ancêtre, le précurseur venu des abysses de la mer… de cette mer qui l’appelle dans ses crinières d’écume…

D’un fragment de ciel il se drape, et quitte le jour pour traverser la nuit, et gravir le sentier d’épines et de ronces, guidé par les doux chants… de l’autre côté du monde…










(dessin : Ernest Pignon-Ernest, extrait de "Zingaro suite équestre" de André Velter ... p.61)

7 commentaires:

pierre a dit…

Pégase
À José Maria de Heredia.

De ses quatre pieds purs faisant feu sur le sol,
La Bête chimérique et blanche s'écartèle,
Et son vierge poitrail qu'homme ni dieu n'attelle
S'éploie en un vivace et mystérieux vol.

Il monte, et la crinière éparse en auréole
Du cheval décroissant fait un astre immortel
Qui resplendit dans l'or du ciel nocturne, tel
Orion scintillant à l'air glacé d'Éole.

Et comme au temps où les esprits libres et beaux
Buvaient au flot sacré jailli sous les sabots
L'illusion des sidérales chevauchées,

Les Poètes en deuil de leurs cultes perdus
Imaginent encor sous leurs mains approchées
L'étalon blanc bondir dans les cieux défendus.
Pierre Louÿs

Anonyme a dit…

http://www.e-litterature.net/publier/spip/article4.php3?cel=&repert=alice&titre=garcin2&num=698&id_auteur=1&crit=Alice%20Granger

camille a dit…

Le cheval chante.

Le hibou miaule.

L'âne gazouille.

Le ruisseau hennit.

- C'est bien, mon enfant:

joue avec les mots.

- Le triangle est rond.

La neige est chaude.

Le soleil est bleu.

La maison voyage.

- Tu as de la chance :

les mots sont amicaux

et généreux.

- Le poisson plane.

La baleine court.

La fourchette a des oreilles.

Le train se gratte.

- Je t'avais prévenu :

maintenant les mots te mordent.


Alain Bosquet

Hélène a dit…

http://www.andrevelter.com/

Jean a dit…

Quel texte !
Quelle vie , quelle intensité , quelle fougue !
Un vrai régal .
Le dessin est bien choisi !

maria-d a dit…

Je ne vous remercie guère ici mais vous lire est toujours pour moi un bonheur... vos passages sont des cadeaux...Oui, anonyme le roman de Garcin sur Bartabas est d'une grande qualité il résonna fort en moi à sa lecture

Beau dimanche à tous

Cochonfucius a dit…

Pégase, toujours jeune, aime encore voler
Et plonger vers le sol près des volcans qui fument.
Le brise boréale ébouriffe ses plumes ;
Il contemple d’en haut les jardins bariolés.

Il traverse les mers tout droit, sans s’affoler ;
Il conserve son cap au milieu de la brume.
Tout au long d’une nuit son ardeur se consume ,
Puis un nouveau soleil s’en vient l’auréoler.

Pégase, emporte-nous vers la lointaine étoile
Que les gens de Bayeux ont brodée sur leur toile
En un trait aussi fin que celui d’un pinceau !

Nous danserons au ciel (ou ce seront nos ombres)
Comme, dans un jardin, d’aimables jouvenceaux ;
Plus rien dans notre coeur ne se montrera sombre.