vendredi 17 décembre 2010

pour Dorio

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" INVISIBILITÉ


quand nous pénétrerons la gueule ed’ de travers

dans l’empire des morts

Raymond Queneau (l’Instant fatal)



Mon séjour sur la terre aura duré duré duré
du 24 mars 1945 jusqu’à "l’instant fatal"
mais ce n’est pas mézigue qui tournera la page ultime

J’aurai filé ad patres avec mes père et mère et toute la tribu que je n’ai pas connue

J’aurai filé la métaphore de la minute d’éternité face au temps universel qui continuera continuer à s’écouler
pour mes enfants et les enfants de mes enfants


Mais pour l’instant nulle fatalité :
un chemin s’ouvre toujours nouveau chaque jour
que poème fait

Cueillons cueillons et accueillons notre invisibilité "


jjDorio

16 décembre 2010



En 1945 il naissait pour durer, durer, durer… « jusqu’à l’instant fatal »

En 1946 Ferré débutait au « Bœuf sur le toit » au même temps que Les Frères Jacques et Charles Aznavour…

En 1956 quelqu’un d’autre naissait pour durer, durer, durer « jusqu’à l’instant fatal » … et Ferré publiait son recueil ''Poètes vos papiers " qui lui vaudra une brouille irrévocable avec Breton.
Madeleine enregistra certains poèmes de ce recueil, dont "Testament".









LE TESTAMENT


Avant de passer l'arme à gauche
Avant que la faux ne me fauche
Tel jour, telle heure, en telle année
Sans fric, sans papier, sans notaire
Je te laisse ici l'inventaire
De ce que j'ai mis de côté:

La serviette en papier où tu laissa ta bouche
Ta mèche de cheveux quand ils n'étaient pas gris
Mon foulard, quelques plumes, et cette chanson louche
Avec autant de mots que nous avions de nuits
L'oreille de Van Gogh, la pipe de Balzac
Cette armée d'anarchie et cette fanfare blême
Le cheval qui travaille avec son petit sac
Où dorment des prairies d'avoine et de carême
Et de carême

L'enfer de Monsieur Dantes où je descend ce soir
Un paquet vide de Celtiques sur la table
Quelques stylos à bille au roulement d'espoir
Avec dans leur roulis des chansons formidables
Le pick-up du tonnerre et les dents de la pluie
La voix d'André Breton, l'absinthe de Verlaine
Les âmes de nos chiens, un bouquet réuni
Et leurs paroles dans la nuit comme une traîne
Comme une traîne

Le zinc de ce bistrot où nous perdions nos gueules
Cette affiche où nos yeux écoutez des "Bravo"
Cette page d'annonce où s'ennuie toute seule
Notre maison avec mes rêves en nez couard dos
Avant de passer l'arme à gauche
Avant que la faux ne me fauche
Tel jour, telle heure, en telle années
Sans fric, sans papier, sans notaire
Il est bien maigre l'inventaire
De ce que j'ai mis de côté

Mais je te laisse ça comme une chanson tendre
Avec ta fantaisie qui fera beaucoup mieux
Et puis ma voix perdue que tu pourras entendre
En laissant retomber le rideau si tu veux
Si tu veux

L. Ferré






3 commentaires:

J... a dit…

Oui bien,
"Cueillons cueillons et accueillons notre invisibilité"
Car en fait, l'on joue avec la mort lorsque l'on joue avec les mots.
entre mort et mot, juste un petit "air" de rien en fait la différence.
♥♥♥

la voix de Madeleine Ferré, tout de même, quelle admirable découverte.

jj dorio a dit…

GARE AUX POÈTES…


pour María-D


Si les puissants de la terre sont capables de provoquer la misère

ils sont incapables d’en supporter la vue.

Bertolt Brecht ( L’opéra de quat’ sous )



Quand tout est gris chantait Ferré

Et même noir ajoutait Claude Nougaro

Gare aux poètes Qui font chanson !



Gare au gorille qui entraîne dans le maquis

les juges qui font couper les cous

et gare à l’Opéra des Gueux

la complaine de Mackie



Quand tout est gris un éclair luit

Richards à la tête de nos pays

Craignez pour vos cous !

J... a dit…

J'ai trouvé ceci et je suis certaine, certaine que cela te plaira beaucoup.

♥♥♥

http://www.dailymotion.com/video/x3fpog_g-brassens-le-testament